Kyôto

Yasunari Kawabata

Le Livre de poche

  • Conseillé par
    2 janvier 2021

    Le jour de la fête de Gion, Chieko rencontre par hasard Naeko, sa sœur jumelle. Bien sûr, Chieko savait qu’elle avait été adoptée par la famille Sata, un couple de riches négociants en tissus de Kyôto, mais elle ignorait l’existence d’une sœur. Pour elle c’est un choc alors que pour Naeko c’est une rencontre naturelle. Elevée à la montagne, recueillie par une famille d’exploitants forestiers spécialistes des cryptomères, la jeune fille n’avait jusqu’ici jamais voulu approcher sa jumelle craignant qu’une simple paysanne n’indispose une jeune fille aisée et moderne. Pourtant, Chieko cherche à se rapprocher de Naeko, mais est-il possible de réunir ce qui a été séparé à la naissance ?

    Un petit bijou de poésie et de délicatesse qui fait découvrir les beautés de Kyôto au fil des saisons. À chaque période de l’année, un festival, une tradition, une merveille de la nature. Tout cela est-il voué à disparaître ? Kawabata situe l’action de son roman dans les années 60, quand le Japon semble vouloir s’américaniser. On trouve de plus en plus de postes de radio dans les boutiques traditionnelles, les kimonos commencent à être fabriqués à la chaîne, les filles et les garçons cherchent l’amour plutôt qu’un mariage arrangé. Chieko est le symbole de ce modernisme. Cultivée et raffinée, c’est une fille de la ville qui profite d’une vie oisive et contemplative. L’auteur lui oppose la douce Naeko, une fille de la montagne, respectueuse des traditions et des classes sociales, habituée au travail du bois, comme ses mains abimées en témoignent. Pour Kawabata, leurs deux mondes sont incompatibles et Kyôto perd son âme par trop de frivolité et de modernité. Comme un baroud d’honneur avant que la ville ne poursuive sa course folle vers le futur, il a voulu raconter tout ce qui en fait la beauté, de sa nature sans cesse renouvelée à ses fêtes marquant les saisons ou ses temples anciens.
    Kawabata est ici d’un pessimisme morbide. Certes Kyôto a changé, évolué, s’est modernisée mais elle n’a pas perdu son âme. On y croise encore des Japonais sensibles à la beauté éphémère d’une fleur de cerisier, on peut encore y assister à fête de Gion…Kyôto reste une perle à découvrir.